Les peintres vietnamiens dans les grandes collections privées

Introduction

Les peintres vietnamiens issus de l’École des beaux-arts de l’Indochine et de la modernité du XXe siècle occupent aujourd’hui une place visible dans de grandes collections privées en Europe, en Asie et aux États-Unis. Leur présence s’explique par des trajectoires artistiques entre Hanoï et Paris, par une diffusion précoce des œuvres dans des foyers de collectionneurs, et par une dynamique de marché soutenue depuis une dizaine d’années. Au sein d’un réseau d’experts et d’institutions, dont le groupe MILLON, ces corpus sont étudiés, catalogués et documentés afin d’en comprendre la provenance, la circulation et la valeur sur le marché de l’art.

Cet article présente une synthèse factuelle sur la présence des artistes vietnamiens dans les grandes collections privées, les typologies d’œuvres rencontrées, les facteurs simples influençant la valeur, les tendances de cote et quelques résultats récents représentatifs. L’objectif est d’offrir une lecture claire, orientée marché, utile aux propriétaires et ayants droit souhaitant mieux situer leurs œuvres dans le contexte actuel.

Définition et description générale de la thématique

Par grandes collections privées, on entend des ensembles structurés d’œuvres acquis sur plusieurs décennies, souvent constitués autour d’un axe géographique ou d’une école. Dans le cas vietnamien, trois profils se distinguent fréquemment. Le premier est celui des collections européennes historiques, formées par des familles installées en Indochine puis établies en France, dont les œuvres sont restées hors circuit pendant des décennies. Le deuxième relève de collections asiatiques contemporaines, actives à Hong Kong, Singapour, Taïwan et au Vietnam, très présentes lors des ventes internationales et attentives aux provenances anciennes. Le troisième correspond à des collectionneurs occidentaux spécialisés en modernités extra-européennes, intégrant les maîtres vietnamiens aux côtés d’artistes chinois, japonais ou indiens.

Ces collections rassemblent principalement des œuvres de Lê Phổ, Mai Trung Thứ, Vũ Cao Đàm, Lê Thị Lưu, Nguyen Phan Chanh, Tô Ngọc Vân, Trần Văn Cẩn, Nguyễn Gia Trí, Nguyễn Tư Nghiêm et d’autres artistes formés ou liés à Hanoï. Leurs œuvres circulent entre legs familiaux, ventes publiques et expositions muséales, ce qui alimente une documentation croissante sur la provenance et soutient l’intérêt des acheteurs.

Typologies, matériaux, périodes, styles

École des beaux-arts de l’Indochine et périodes clés

L’École des beaux-arts de l’Indochine est créée à Hanoï au milieu des années 1920. Cette formation structure des carrières qui s’étendent des années 1930 aux années 1970, avec des jalons importants comme la période de l’entre-deux-guerres à Hanoï, le séjour ou l’installation en France à partir de la fin des années 1930, puis les décennies d’après-guerre. De nombreux artistes enseignent ou exposent à Paris, Nice ou dans des galeries spécialisées, favorisant une diffusion durable dans les collections privées.

Supports et techniques les plus rencontrés en collection

Les collections privées concentrent quatre familles de supports. La soie peinte à l’encre et à la gouache constitue un marqueur majeur pour Lê Phổ et Mai Trung Thứ. La laque sur panneau ou paravent est déterminante pour Nguyễn Gia Trí et Lê Quốc Lộc. L’huile sur toile est présente chez Tô Ngọc Vân, Lê Phổ ou Nguyen Phan Chanh selon les périodes. La sculpture et la céramique, notamment chez Vũ Cao Đàm, apparaissent ponctuellement. Ces typologies coexistent au sein de collections structurées qui recherchent des ensembles cohérents par période ou par artiste.

Sujets et formats prisés

Les scènes familiales, maternités, portraits de femmes, compositions d’enfants, et paysages ruraux sont fréquemment recherchés. Les formats moyens à importants sont privilégiés en soie et en laque, tandis que l’huile sur toile et les œuvres sur papier couvrent des formats variés. La présence d’un cachet d’artiste, d’une inscription ou d’une signature claire est attendue par les collectionneurs et pèse sur la valeur. Les œuvres accompagnées d’un certificat par un ayant droit ou d’une mention d’exposition historique bénéficient d’une demande soutenue.

Facteurs simples influençant la valeur

Plusieurs critères factuels et vérifiables influencent la valeur d’une œuvre vietnamienne en collection privée. Le support est déterminant. Les soies de Lê Phổ et de Mai Trung Thứ, les laques de Nguyễn Gia Trí, ainsi que certaines huiles de Tô Ngọc Vân ou de Nguyen Phan Chanh figurent parmi les segments les plus convoités. La période de création joue un rôle central, notamment les années 1930-1940 pour les soies et les laques, et les périodes parisiennes pour certains artistes.

La qualité de la provenance constitue un autre facteur clé. Une œuvre demeurée dans la même famille depuis l’acquisition d’origine, ou provenant d’une collection connue, est plus lisible pour le marché. La présence d’expositions documentées, de catalogues d’époque ou d’une mention dans un catalogue raisonné contribue à la traçabilité. La signature, le cachet, les inscriptions et les dimensions renforcent l’attractivité, de même que la rareté d’un sujet par rapport à l’ensemble de l’œuvre d’un artiste.

Enfin, la visibilité récente de l’artiste en ventes publiques internationales et la comparaison avec des adjudications de référence permettent de situer la valeur relative d’un tableau, d’un paravent laqué ou d’une soie. Les acheteurs examinent les équivalents par technique, période, sujet et format pour établir des repères réalistes.

Marché de l’art: demande, cote, valeur

Le marché des maîtres vietnamiens bénéficie d’une demande plurielle. En Europe, Paris concentre des vacations spécialisées alimentées par des provenances historiques et des redécouvertes. En Asie, les places de Hong Kong et Singapour soutiennent la compétition internationale. Les collectionneurs attachent de l’importance à la cohérence d’ensemble, recherchant des séries de soies de Mai Trung Thứ ou des ensembles en laque de Nguyễn Gia Trí. La cote s’est renforcée sur des œuvres iconiques et bien documentées, avec des adjudications à six voire sept chiffres en euros pour des pièces emblématiques.

Les résultats récents confirment l’appétit pour les provenances privées européennes, avec des œuvres restées dans les familles depuis les années 1930-1950 et réapparues en salle. Des collections historiques, comme celle associée à la duchesse de Windsor pour des œuvres de Mai Trung Thứ, illustrent l’intérêt des grands ensembles constitués dès le milieu du XXe siècle. La visibilité accrue dans des expositions commémoratives et la publication de catalogues contribuent à la lisibilité des corpus et à la consolidation de la valeur.

Résultats de ventes

• Lê Phổ, “Le bain”, Aguttes, Neuilly-sur-Seine, 13 mai 2025, lot 9, 2 022 959 €.

• Mai Trung Thứ, “La ronde des enfants”, Aguttes, 26 septembre 2023, lot 8, 590 560 €.

• Nguyen Phan Chanh, “Les Chanteuses de Campagne”, Sotheby’s Paris, 14 juin 2024, lot 89, 1 020 000 €.

• Nguyễn Gia Trí, “Villageoises parmi des bananiers”, Drouot Estimations, Hôtel Drouot, 2 décembre 2022, lot 59, 1 004 400 €.

Conclusion

La présence des peintres vietnamiens dans les grandes collections privées s’appuie sur des provenances anciennes, des redécouvertes régulières et une demande internationale organisée autour des soies, laques et huiles emblématiques. Situer une œuvre dans son contexte biographique, établir une provenance claire et comparer les adjudications récentes par technique et période sont les étapes essentielles pour comprendre sa valeur. Pour obtenir une lecture argumentée et confidentielle de vos œuvres, sollicitez une estimation gratuite auprès de Fabien Robaldo. Un avis indépendant, fondé sur des références vérifiées et des résultats comparés, vous permettra d’orienter vos décisions en toute clarté.

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