L’utilisation de l’or dans l’art de l’icône russe : Techniques, symbolique et valeur
L’icône russe est l’un des piliers de l’art sacré orthodoxe, mêlant spiritualité, tradition et savoir-faire artisanal. Parmi les éléments les plus remarquables de ces œuvres, l’utilisation de l’or occupe une place centrale. Qu’il s’agisse de la feuille d’or appliquée sur les fonds ou des ornements en or massif, ce métal précieux confère aux icônes une aura de sacralité et une valeur esthétique et marchande non négligeable. Dans cet article, nous explorons les usages de l’or dans l’iconographie russe, ses techniques d’application, sa symbolique religieuse et son impact sur l’expertise, l’estimation et la cote de ces objets en salle des ventes.
Origines et évolution de l’icône russe
L’icône byzantine, importée en Russie dès le Xe siècle avec la conversion de la Rus’ de Kiev au christianisme orthodoxe, est à l’origine de l’icône russe. Rapidement, les artistes russes développent un style propre, influencé par les écoles de Novgorod, Moscou ou encore Vladimir-Souzdal. L’utilisation de l’or y devient une constante, notamment à partir du XIVe siècle, période où l’iconographie atteint un raffinement technique et symbolique important. Les icônes anciennes sont réalisées sur panneaux de bois, recouverts d’un enduit de gesso. L’or est ensuite appliqué sur les fonds ou les auréoles, souvent à la feuille, parfois en poudre mélangée à des liants. Ce procédé, délicat, nécessite une grande maîtrise technique.
Les techniques d’application de l’or dans les icônes russes
La dorure à la feuille
La technique la plus courante est la dorure à la feuille d’or. Les artistes appliquent une feuille d’or extrêmement fine sur une surface préalablement recouverte de bol d’Arménie (argile rouge). Cette couche permet à l’or d’adhérer et d’obtenir un éclat particulier après brunissage. Ce procédé est utilisé pour les fonds, les auréoles, les vêtements ou les éléments architecturaux présents dans la scène représentée. Il est fréquent que certaines zones soient rehaussées à l’aide de gravures ou de poinçonnages décoratifs dans l’or.
La dorure au mixtion
Moins fréquente dans les icônes anciennes, la dorure au mixtion apparaît surtout à partir du XVIIIe siècle. Elle consiste à appliquer une colle spéciale (le mixtion) sur la zone à dorer, puis à y poser la feuille d’or. Cette technique est plus simple mais donne un résultat moins lumineux que la dorure à la détrempe.
Le zlatoust et les oklads
Outre la dorure picturale, certaines icônes sont recouvertes d’un revêtement métallique appelé “oklad” ou “riza”, souvent en argent doré ou en or massif. Ces plaques, finement ciselées, laissent apparaître uniquement les visages et les mains des personnages. Elles sont parfois serties de pierres précieuses. Le zlatoust, terme désignant les objets liturgiques dorés, inclut ces oklads et témoigne du lien entre l’orfèvrerie et l’iconographie.
Symbolique de l’or dans l’iconographie orthodoxe
Dans l’art sacré orthodoxe, l’or n’est pas un simple ornement. Il symbolise la lumière divine, l’intemporalité et la présence de Dieu. Contrairement à la peinture réaliste occidentale, l’icône ne cherche pas à représenter la réalité physique, mais une réalité spirituelle. Le fond doré, sans perspective ni ombre, évoque le royaume céleste. Il n’y a ni jour ni nuit, ni espace mesurable : l’or est donc un langage théologique autant qu’un choix esthétique.
Impact de l’or sur la valeur et l’estimation des icônes russes
La présence d’or, qu’il s’agisse de dorure picturale ou d’un oklad en métal précieux, influence directement la valeur marchande d’une icône. Cependant, ce n’est pas le seul critère pris en compte lors d’une expertise.
Critères d’évaluation
Un expert examine plusieurs éléments :
– L’ancienneté (époque de réalisation)
– L’école ou la région d’origine (Novgorod, Moscou, Palekh…)
– L’état de conservation
– La qualité picturale
– La présence d’un oklad en or ou argent doré
– La provenance (collection, monastère, etc.)
Une icône du XVIe siècle avec un fond en or d’origine et un oklad en or massif peut atteindre plusieurs dizaines de milliers d’euros.
Exemples de ventes aux enchères
– En 2021, une icône russe du XVIIIe siècle représentant la Vierge de Vladimir, avec un oklad en argent doré, a été adjugée 18 000 € chez Interencheres (lot 214, vente du 12 mars 2021).
– Chez Christie’s, le 26 novembre 2018, une icône de la Déisis avec fond doré et oklad en or, datée du XVIIe siècle, a été vendue 45 000 £ (lot 76).
– Invaluable.com recense également une icône russe avec oklad en vermeil, vendue 22 000 € en 2020 chez Czerny’s Auction House (lot 138).
Écoles et périodes : influence sur la présence de l’or
Certaines écoles iconographiques privilégient l’usage de l’or de manière plus ou moins marquée. L’école de Moscou, notamment au XVe siècle, est réputée pour la richesse de ses fonds dorés et de ses oklads. Inversement, les écoles plus austères comme celle du Nord russe (Pomorie) utilisent l’or avec parcimonie, privilégiant la sobriété. Au XIXe siècle, avec l’essor de la production industrielle d’icônes, l’or est parfois remplacé par des imitations (peinture dorée, feuilles métalliques), ce qui influe sur la cote en vente publique.
Conclusion
L’or joue un rôle fondamental dans l’art de l’icône russe, tant sur le plan spirituel qu’artistique. Sa présence, sa qualité d’application et son association à des éléments ornementaux comme les oklads sont des critères déterminants dans l’estimation d’une icône. Pour toute expertise ou évaluation d’une icône russe, il est essentiel de faire appel à un professionnel qualifié. Le bureau d’expertise Fabien Robaldo vous accompagne dans l’identification, l’estimation gratuite et l’analyse de la valeur de vos icônes, en tenant compte de tous les paramètres historiques, stylistiques et matériels.
FAQ : L’or dans l’art de l’icône russe
Quelle est la signification de l’or dans une icône russe ?
L’or symbolise la lumière divine, l’éternité et la présence de Dieu dans l’art orthodoxe.
Comment l’or est-il appliqué sur une icône ?
Principalement par dorure à la feuille, sur un fond préparé avec du bol d’Arménie, puis brunie pour révéler son éclat.
Quelle est la différence entre une icône dorée et une icône avec un oklad ?
Une icône dorée utilise de la feuille d’or sur le panneau, tandis qu’un oklad est un revêtement métallique posé dessus, souvent en argent doré ou or.
Les icônes avec de l’or sont-elles plus précieuses ?
Pas systématiquement, mais la présence d’or peut augmenter la valeur si elle est d’origine et bien conservée.
Comment savoir si l’or d’une icône est authentique ?
Une expertise professionnelle est nécessaire pour analyser les matériaux et les techniques employées.
Quels styles ou écoles utilisent beaucoup d’or ?
L’école de Moscou et celle de Palekh sont connues pour leur usage raffiné de l’or.
Peut-on restaurer une dorure ancienne ?
Oui, mais cela doit être fait par un restaurateur spécialisé pour ne pas altérer l’œuvre.
Quel est le prix moyen d’une icône avec dorure ?
Les prix varient de 1 000 à plus de 50 000 €, selon l’époque, la qualité et la présence d’un oklad.
Les oklads sont-ils toujours en or massif ?
Non, ils sont souvent en argent doré. L’or massif est rare et réservé à des œuvres prestigieuses.
Comment dater une icône dorée ?
Par l’analyse stylistique, les matériaux, les inscriptions et parfois les tests scientifiques (carbone 14, pigments).
L’or utilisé est-il toujours de 24 carats ?
Généralement, la feuille d’or est très pure, mais des alliages peuvent être utilisés selon les époques.
Où faire expertiser une icône avec dorure ?
Chez un expert spécialisé comme le bureau Fabien Robaldo.